Lundi 26 mai 2008 à 13:42
D'un souffle coupé, rapide, troublé, je murmure:
"Elle
est froide. Touche, Regarde ses doigts! Ses phalanges sont bleues. Regarde! Le
sang ne passe plus. Regarde bordel! "
J'ai peur. Je serre tendrement sa main, elle ne se réchauffe pas pour autant. Elle est molle,
toute molle. Je prie, j'espère: "bouge petite main, bouge s'il te plait." Je la lâche, la laisse aller à son grès. Elle tombe brutalement sur ma cuisse. Je renouvelle l'opération pour me rassurer. Rien à faire. Je frémis.
" Putain mais elles sont gelées!
_ mais oui bordel elles sont bleues."
Je répète en écho, désespérément, d'une voix faible, fragile, incertaine :
" Elles sont bleues."
Que se passe-t-il? Où
sommes nous? Que fait-elle là, étendue sur le parquet?
" Mais elle respire?
_ J'sais pas. Ça bat pas. "
J'ai mal à la tête. Mes cheveux me serre le crâne. Où est-ce mon cerveau? Que se passe-t-il? Respirer me devient peu à peu compliqué. Je tremble. Mes dents se heurtent involontairement à plusieurs reprises. J'ai un nœud dans la gorge. Aucune larme ne sort pourtant. Aucune envie de vomir. Rien. Juste un sentiment
de malaise, de tristesse profonde, d'angoisse envahissante. La fenêtre laisse passer un soleil aveuglant. Mais la chambre me semble sombre, oppressante.
" Ça bat pas??!" Crie l'autre à côté de moi.
Il est là, à ma gauche. Nous observe, elle et moi, ne bouge pas. Il est peut-être apeuré. Peut-être. Peut-être pas. J'ai
l'impression d'être seule. Il n' y a qu'elle et moi. Elle, allongée par terre,
moi à ses côtés. Je la prends dans mes bras, la porte. Elle est légère. Toute
légère. Comme une plume. Peut-elle s'envoler ? Son corps est détendu, solitaire. Un sourire muet, calme, est prisonnié sur son visage encore doux mais pâle.
Mes larmes jaillissent d'un coup.
« Elle est MORTE
putain ! Elle est morte ! T'entends ? Morte ! »
Ca ne serre à rien que je t'explique, tu as compris toi hein? Moi non. Je ne voulais pas comprendre. Je ne veux pas qu'elle s'en aille. Elle me manque déjà, son sourire,
ses expressions, ses malheurs, ses bêtises. J'arrête de pleurer. Ce n'est pas
possible, tout ne s'évapore pas aussi rapidement. Il y a un problème quelque
part, tu ne crois pas ? Arrête de me regarder comme ça, d'un air compatissant. Tu m'énerve, tu me rends dingue à ne pas réagir. Pourquoi rien ne t'atteins ? Mes yeux s'embrument, ma pensée aussi. J'ai besoin d'elle. Juste d'elle. où est-elle maintenant ?
« Tu ne comprends toujours pas ? »
Je fond en larme. Ce ne sera pas la dernière
crise de larme. C'est bizarre comme elles apparaissent, puis disparaissent d'un
coup. C'est mes giboulées de Mars à moi.
« Va-t-en ! Elle est morte. J' veux plus te voir. Elle est morte. Laisse moi. Laisse moi. »
† YSL's Dead. †